Quand archéologie rime avec agriculture et élevage 🚜
[Focus] Avec l’été vient le temps des moissons. L’heure pour l’archéologie de faire un point agricole. Outils, bâtiments, restes organiques, etc. Les indices sur nos chantiers sont variés. Comment leur découverte et leur étude en post-fouille permettent de restituer les pratiques agricoles et le paysage d’un territoire dans le passé ? Explications.
Un site archéologique peut compter des indices très variés de la présence d’activités agricoles ou pastorales. Ils se partagent entre trois éléments :
- le mobilier archéologique qui contient les artéfacts (objets fabriqués par l’humain) et les écofacts (restes organiques conservés sur le site comme des graines par exemple)
- les structures archéologiques qui sont les vestiges construits ou creusés par les humains implantés sur le site : bâtiments, fossés, etc.
- les études paléo-environnementales qui peuvent être effectuées après la phase de terrain à partir de prélèvements effectués sur le site. Elles peuvent être effectuées à la recherche d’écofacts plutôt invisibles à l’œil nu.
Tous font l’objet de démarches spécifiques pour en tirer le plus d’informations possibles.
Des structures archéologiques
Parmi les indices d’activités de culture ou d’élevage d’animaux, on trouve les fossés parcellaires. Comme leur nom l’indique, ces fossés délimitent des parcelles de terrain entre propriétaires ou entre différentes activités. Ils existent dès le Néolithique et jusqu’à aujourd’hui. Si une parcelle est vide d’autres vestiges archéologiques (bâtiments par exemple), cela peut signifier qu’elle est utilisée pour la culture ou la pâture.
Une autre structure « en creux » est régulièrement mise au jour dans le cadre d’occupations protohistoriques ou médiévales et peut être rattaché à l’agriculture : le silo.
Ce trou creusé dans le sol permet la conservation des grains à l’échelle d’une propriété voire d‘un village avec des aires d’ensilage regroupant plusieurs silos.
Les bâtiments utiles à l’agriculture ou l’élevage d’animaux sont variés : granges, étables, greniers à grains, etc.
Pour une grande partie des époques étudiées par le service (Protohistoire, Antiquité et Moyen Âge), ces bâtiments possèdent une ossature en bois. Leur charpente repose sur des poteaux plantés au sol et calés ; les murs sont généralement réalisés en terre à bâtir (torchis, pisé, etc.).
Cependant, le bois comme la terre à bâtir sont des matériaux périssables, c’est-à-dire qu’ils se détruisent naturellement dans le temps. Leur conservation n’est possible que dans certaines conditions climatiques (milieu humide par exemple) ou après un évènement particulier (comme un incendie).
Les archéologues retrouvent donc le plus fréquemment les trous qui ont servis à placer les poteaux.
Or, l’existence la présence de trous de poteaux formant un bâtiment à ossature en bois ne signifie pas forcément qu’il soit dédié aux activités agro-pastorales. Il peut aussi s’agir d’une habitation ou d’un bâtiment lié à l'artisanat. C’est donc l’ensemble des faisceaux d’indices (mobilier et structures archéologiques ainsi que les analyses paléo-environnementales) qui peut permettre l’identification de sa fonction.
Des artéfacts
Quelques exemples d’outils utilisés pour le travail dans les champs :
- faux
- serpe
- houe
- pelle bêche
Ces objets, souvent en fer, peuvent se conserver dans le temps malgré la corrosion qui « grignote » lentement le métal.
Les objets mis au jour sur un site peuvent aussi être des outils de transformation de produits de culture. La meule, par exemple, permet de moudre les grains en farine. Le mortier quant à lui va être utilisé pour écraser la nourriture, plutôt dans un cadre domestique comme la préparation de repas.
Peu d’objets manufacturés mis au jour sur les sites archéologiques indiquent clairement l’élevage d’animaux. En effet, cette activité nécessite peu d'outillage spécifique et qui puisse se conserver jusqu'à aujourd'hui.
Cependant, on peut citer en exemple une clarine découverte par le service en 2013.
Des écofacts
Au niveau macroscopique, ce sont notamment les graines carbonisées. Il peut en rester par exemple au fond des silos. Afin de vérifier leur présence, du sédiment est prélevé puis tamisé à l’eau : en effet, les graines carbonisées flottent en surface, ce qui permet d’en récupérer un maximum. C’est ensuite le ou la carpologue qui va les étudier (identification, comptage, etc.).
Ensuite, il existe plusieurs types d’études paléo-environnementales qui peuvent être réalisées afin d’identifier les éléments naturels conservés au niveau microscopique (pollens, parasites, etc.) et présents des sédiments prélevés sur le terrain.
L’objectif de cette recherche est une compréhension globale du paysage naturel sur le site archéologique et autour de celui-ci : présence de forêts, de pâtures voire de cultures céréalières.
D’autres écofacts, les matières animales, renseignent elles aussi sur les pratiques agricoles. En effet, l’étude archéozoologique identifie les espèces animales auxquelles appartiennent les ossements retrouvés sur le site. Elle peut déterminer aussi l’âge de l’animal ou encore son état de santé.
Cela informe notamment sur la consommation alimentaire du site et l’usage quotidien des animaux : travail agricole, trait dans les champs, production de lait, de laine, etc.